On a franchement cru à un canular, tellement c’était gros… même si venant de Carthage, ce qu’on a pris pour des canulars, ces deux dernières années, s’est révélé être, pour l’essentiel, des vérités révélées et vérifiées. Au point que rien n’étonne plus des «écarts» — automatiquement transformés en anecdotes — protocolaires, diplomatiques et politiques du président provisoire. Ce qui a toujours fait le bonheur des médias et des réseaux sociaux.
Renvoyer de son propre chef un ambassadeur (syrien) qui n’était pas en poste ou s’ingérer dans les affaires intérieures — et lointaines — de nos voisins algériens, en leur «rappelant» que leur pays «n’aurait pas sombré dans la violence», si les islamistes avaient accédé au pouvoir comme le scrutin du début des années 1990 en avait décidé, relève non pas de bévues mais d’erreurs graves que ne doit pas commettre un chef d’Etat, fût-il provisoire. Medelci, le ministre algérien des Affaires étrangères, le lui a fait bien savoir.
Récidiver avec nos frères égyptiens en s’immisçant dans leur conflit de la tribune des Nations unies ou condamner un essai nucléaire nord-coréen (!) dénote une immaturité politique criarde.
Annoncer, sans concertation aucune, un sommet de relance de l’Union du Maghreb arabe qui n’a, en fin de compte, pas eu lieu, provoquant l’ire des médias et des observateurs, comme ce fut le cas lorsqu’il s’est proposé comme médiateur entre le Maroc et l’Algérie (proposition rejetée) dans un conflit stratégique vieux de plusieurs décennies, ne peut provenir d’un président de la Tunisie qui a eu pour bâtisseur Bourguiba, un grand visionnaire de la politique internationale. Même Ben Ali, qui connaissait, certainement, ses limites, n’a jamais osé s’aventurer dans des terrains aussi brûlants.
La liste de ce qu’a «commis» notre président est bien longue, mais cela n’est pas très dangereux, malgré l’atteinte indiscutable à l’image de notre pays. M. Marzouki ne s’est pas contenté de ces innombrables bourdes, il est passé au palier supérieur en se permettant le grave… l’impardonnable, en faisant publier son «Livre noir».
Nous ne nous embourberons pas dans des analyses de ses stimulants et de ses visées politiques, en tant que CPRiste invétéré; ce parti opposé jusqu’à la véhémence au Dialogue national. Nous ne nous enfoncerons pas dans la dissection des raisons qui l’ont poussé à rendre public son «Livre noir», en ce moment précis où la Tunisie commence à espérer, enfin, que la crise politique trouvera issue. Nous ne disserterons pas non plus sur la tentative de discréditer un secteur dont l’image monte dans les sondages, alors que la sienne est en chute libre.
Nous nous contenterons de dire à Monsieur le Président qu’il a abusé de son pouvoir en exploitant, à titre individuel et sans recourir à une commission indépendante, des archives publiques qui ne lui appartiennent pas. Nous lui rappellerons qu’en tant que chef de l’Etat, supposé réunir les Tunisiens et apaiser les tensions, il a failli à sa mission, surtout en ce moment critique que traverse le pays. Nous lui prédirons, enfin, que quels que soient le contenu, les noms et le bien-fondé de ses feuillets, les Tunisiens et l’histoire les retiendront comme le «Livre noir» de Marzouki ; un président qui n’aura jamais eu la sagesse, le bon sens ou la grandeur d’âme d’un certain… Mandela.
Slaheddine GRICHI, La Presse de Tunisie, 1er décembre 2013
Renvoyer de son propre chef un ambassadeur (syrien) qui n’était pas en poste ou s’ingérer dans les affaires intérieures — et lointaines — de nos voisins algériens, en leur «rappelant» que leur pays «n’aurait pas sombré dans la violence», si les islamistes avaient accédé au pouvoir comme le scrutin du début des années 1990 en avait décidé, relève non pas de bévues mais d’erreurs graves que ne doit pas commettre un chef d’Etat, fût-il provisoire. Medelci, le ministre algérien des Affaires étrangères, le lui a fait bien savoir.
Récidiver avec nos frères égyptiens en s’immisçant dans leur conflit de la tribune des Nations unies ou condamner un essai nucléaire nord-coréen (!) dénote une immaturité politique criarde.
Annoncer, sans concertation aucune, un sommet de relance de l’Union du Maghreb arabe qui n’a, en fin de compte, pas eu lieu, provoquant l’ire des médias et des observateurs, comme ce fut le cas lorsqu’il s’est proposé comme médiateur entre le Maroc et l’Algérie (proposition rejetée) dans un conflit stratégique vieux de plusieurs décennies, ne peut provenir d’un président de la Tunisie qui a eu pour bâtisseur Bourguiba, un grand visionnaire de la politique internationale. Même Ben Ali, qui connaissait, certainement, ses limites, n’a jamais osé s’aventurer dans des terrains aussi brûlants.
La liste de ce qu’a «commis» notre président est bien longue, mais cela n’est pas très dangereux, malgré l’atteinte indiscutable à l’image de notre pays. M. Marzouki ne s’est pas contenté de ces innombrables bourdes, il est passé au palier supérieur en se permettant le grave… l’impardonnable, en faisant publier son «Livre noir».
Nous ne nous embourberons pas dans des analyses de ses stimulants et de ses visées politiques, en tant que CPRiste invétéré; ce parti opposé jusqu’à la véhémence au Dialogue national. Nous ne nous enfoncerons pas dans la dissection des raisons qui l’ont poussé à rendre public son «Livre noir», en ce moment précis où la Tunisie commence à espérer, enfin, que la crise politique trouvera issue. Nous ne disserterons pas non plus sur la tentative de discréditer un secteur dont l’image monte dans les sondages, alors que la sienne est en chute libre.
Nous nous contenterons de dire à Monsieur le Président qu’il a abusé de son pouvoir en exploitant, à titre individuel et sans recourir à une commission indépendante, des archives publiques qui ne lui appartiennent pas. Nous lui rappellerons qu’en tant que chef de l’Etat, supposé réunir les Tunisiens et apaiser les tensions, il a failli à sa mission, surtout en ce moment critique que traverse le pays. Nous lui prédirons, enfin, que quels que soient le contenu, les noms et le bien-fondé de ses feuillets, les Tunisiens et l’histoire les retiendront comme le «Livre noir» de Marzouki ; un président qui n’aura jamais eu la sagesse, le bon sens ou la grandeur d’âme d’un certain… Mandela.
Slaheddine GRICHI, La Presse de Tunisie, 1er décembre 2013