Sarkozy et BHL son-ils complices dans l’assassinat de Kadhafi ? La question mérite d’être posée, pas seulement eu égard au chaos libyen actuel, ou par rapport aux quelques millions d’euros supposés avoir servis à la campagne électorale de Sarkozy –ce qui reste à démontrer-, mais surtout par rapport aux milliards de dollars des avoirs libyens, de leurs bons de trésors, de leurs investissements dans certaines grandes entreprises, banques et assurances européennes. Qu’est devenu tout cet argent, qui n’appartenait pas au « dictateur » et à ses fils, comme on a voulu le faire croire, mais à l’Etat libyen ?
Mahmoud Jibril : « C’est un agent étranger qui s’est mêlé aux brigades révolutionnaires pour tuer Kadhafi » !
Si ces questions ne préoccupent guère certains médias français, qui sont résolument libres et indépendants, comme chacun sait, elles intéressent par contre la presse italienne, allemande et même britannique, dont le gouvernement est pourtant tout aussi impliqué que celui de Sarkozy dans l’invasion et la destruction de la Libye.
Dès 2012, la presse britannique s’est posée les questions interdites en France. Dans un article publié dans le Daily Mail du 30 septembre 2012, Peter Allen a laissé entendre que le colonel Kadhafi aurait été tué, « sur ordre de Nicolas Sarkozy, par un homme des services français ayant infiltré le groupe de rebelles libyens ». Selon le journaliste anglais, « Kadhafi avait été tué d’une balle dans la tête, et bien que son arrestation et sa mise à mort avaient été filmées, la vidéo était trop confuse pour permettre de comprendre quelles étaient les circonstances exactes de sa mort, et surtout, quel était son auteur ».
Peter Allen a étayé sa thèse par cette déclaration de Mahmoud Jibril, en 2012, sur une chaine de télévision égyptienne : « C’est un agent étranger qui s’est mêlé aux brigades révolutionnaires pour tuer Kadhafi ». Citant des sources diplomatiques à Tripoli rapportées par le quotidien italien Corriere Della Sera, Peter Allen a indiqué qu’il « est probable que le tueur étranger de Kadhafi soit français », en ajoutant que, « Depuis les débuts du soutien de l’OTAN à la révolution, fortement appuyée par le gouvernement de Nicolas Sarkozy, Kadhafi a ouvertement menacé de révéler les détails de sa relation avec l’ancien président de la France, incluant les millions de dollars payés pour financer sa candidature aux élections de 2007 ».
Toujours selon le Daily Mail, « Rami El Obeidi, qui était responsable des Affaires Etrangères pour le Conseil National de Transition qui a succédé au régime de Kadhafi, affirme qu’il était possible de suivre ce dernier (Kadhafi) à la trace au moyen de son système de télécommunications satellite, et que ses communications avec le président syrien Bashar Al-Assad ont été interceptées. Les experts de l’OTAN savaient que les communications venaient de Syrte, et que c’était donc l’endroit où le dictateur libyen avait trouvé refuge. Kadhafi avait été retrouvé par les rebelles libyens après que des frappes de l’OTAN aient attaqué un convoi dans lequel il se trouvait. Il s’était dissimulé dans une canalisation d’égout et c’est là que les rebelles se sont emparés de lui et qu’ils l’ont tué après l’avoir violenté ».
BHL, disciple d’Heidegger ou imitateur de Goebbels ?
C’est exactement cette version là que Bernard Henri-Lévy s’est empressé de vendre aux médias français qui lui sont acquis. C’était le soir même de l’assassinat de Kadhafi, le 20 octobre 2011. Sans avoir été annoncé par David Pujadas, le présentateur du journal du 20h sur France 2, BHL a surgi derrière les caméras et s’est installé sur le plateau qui recevait le ministre de la Défense, Gérard Longuet. Nous avons cherché la vidéo de cette séquence qui restera dans les annales, et dont voici le récit.
Lors de ce journal télévisé, France 2 venait de passer un document sur la capture et la mort de Kadhafi. Ne sachant pas encore qu’il s’agissait d’une affaire amenée à devenir un secret d’Etat, cette chaine publique laissait clairement entendre que dans sa « fuite », le cortège du guide libyen a été stoppé par un bombardement de l’aviation de l’OTAN, et que Kadhafi a été capturé par des militaires français, puis remis aux insurgés.
C’est à ce moment là que surgit BHL et avant même de s’asseoir, s’empresse de rectifier le tir de la balle qui a tuée Kadhafi ! Ce que Gérard Longuet, supposé ministre de la Défense, n’a pas eu le temps ou le réflexe de faire. Il ne disait rien, alors que BHL semblait être plus informé que lui, en tout cas plus bavard. Visiblement contrarié par le document qui venait de passer et par le commentaire de David Pujadas, BHL a laissé entendre qu’il ne faut pas dire n’importe quoi aux téléspectateurs et que, bien informé, sa version des faits est tout autre.
Le problème, ce soir là, c'est que les images contredisaient les récits. Sur France 2, des bouts des lèvres, David Pujadas l'a fait remarquer à BHL, qui venait d'avoir ses copains rebelles au téléphone et tirait de cette conversation une histoire aussi fantasmagorique que captivante : « Kadhafi se cachait dans une sorte d'égout. Il a cru que c'était des gens à lui qui approchaient. Il y a eu des échanges de tirs, et c'est à la suite de ces échanges de tirs que Kadhafi aurait été abattu. » Mais ces images qui ressemblent à un lynchage, demande Pujadas ? « Dans toutes les révolutions, il y a des moments de ce genre où le groupe en fusion devient beaucoup moins sympathique », a répondu le philosophe pathétique.
Conscient de l’enjeu capital que présentaient les circonstances de la capture et de l’exécution de Kadhafi, enjeu en termes d’image de la France, terre des droits de l’homme, BHL a passé les quatre jours suivants le 20 octobre 2011 à convaincre l’opinion française de sa version édulcorée. « Plus le mensonge est gros, plus il passe », disait le sinistre Joseph Goebbels. De journal en radio et d’une télévision à l’autre, BHL a ressassé la même chose, à savoir que Kadhafi a été arrêté par les rebelles, c’est-à-dire les mercenaires du Qatar, de la Grande Bretagne et de la France et que c’est par l’un d’entre eux qu’il a été abattu.
L’exception Daniel Schneidermann
Dans cette masse de journalistes caporalisés, il y a toujours quelques rares exceptions qui honorent, pas seulement leur métier, mais aussi la grandeur de la France. C’est le cas de Daniel Schneidermann, présentateur et producteur d’« Arrêt sur images ». Dès le 21 octobre 2011, il a publié sur le site de son émission ce papier sous le titre suggestif de « Kadhafi, BHL, et la question sans réponse » :
« Il n'y aura jamais de procès Kadhafi: cela n'arrange-t-il pas beaucoup de monde, des gouvernements occidentaux aux compagnies pétrolières ? Cette question que chacun se pose, Patrick Cohen la pose à BHL. Car BHL est là, ce matin, sur France Inter, on se réveille avec lui après avoir soupé hier soir en sa compagnie sur Canal+ et France 2. Qui dit Libye dit BHL (comme le regrette sur son compte Twitter Vanessa Descouraux, journaliste d'Inter plusieurs fois envoyée spéciale dans les révolutions arabes: "dommage, on aurait pu inviter quelqu'un qui connait la Libye et les Libyens.") Mais il faut que BHL soit là, pour éviter que les questions soient posées. Attention! avertit immédiatement BHL à l'adresse de Cohen. Vous êtes tout près de la théorie du complot ! Vous n'y êtes pas encore, mais vous vous approchez de la zone interdite. Kadhafi a été achevé par des jeunes gens sympathiques et un peu énervés, il faut les comprendre, je le regrette, tout le monde le regrette, le CNT le regrette, je le sais, je leur ai parlé, mais c'est ainsi, on ne fait pas d'omelette, etc. BHL n'interdit rien, ne censure rien, il n'est pas maire de Puteaux, il ne va pas tenter de faire acheter tous les exemplaires de France Inter dans les transistors, mais il est là, ce matin, pour borner les curiosités, en plein jour, au vu et au su de chacun, puisque c'est ainsi qu'il sied de procéder ».
Dans l’histoire, les mensonges d’Etat ne manquent pas. Ils sont même parfois nécessaires, précisément lorsqu’ils répondent à la Raison d’Etat. Encore faut-il qu’ils soient bien ficelés, bien étudiés et suffisamment crédibles. C’est a priori le cas de la capture de Saddam Hussein, le 14 décembre 2003, à la suite d’une trahison, comme cela a toujours été le cas chez les Arabes. Mais les Américains, qui sont passés maitres dans l’art de la désinformation et de la manipulation, ont été un peu plus intelligents que les assassins de Kadhafi. Ils ont arrêté Saddam Hussein pour le remettre à leurs mercenaires irakiens, ne le privant pas ainsi d’un procès, fut-il des plus iniques. Le colonel Kadhafi n’a pas eu droit à un tel « privilège », probablement parce que sa liquidation ne répondait guère à la sacro-sainte Raison d’Etat !
Nebil Ben Yahmed
Vidéo France Inter, Patrick Cohen dans le 7/9 sur France Inter, à 8h20 :
http://www.dailymotion.com/video/xlu0r1_bernard-henri-levy_news?start=264
Original en anglais de l’article signé par Peter Allen et publié dans le Daily Mail :
http://www.dailymail.co.uk/news/article-2210759/Gaddafi-killed-French-secret-serviceman-orders-Nicolas-Sarkozy-sources-claim.html
Mahmoud Jibril : « C’est un agent étranger qui s’est mêlé aux brigades révolutionnaires pour tuer Kadhafi » !
Si ces questions ne préoccupent guère certains médias français, qui sont résolument libres et indépendants, comme chacun sait, elles intéressent par contre la presse italienne, allemande et même britannique, dont le gouvernement est pourtant tout aussi impliqué que celui de Sarkozy dans l’invasion et la destruction de la Libye.
Dès 2012, la presse britannique s’est posée les questions interdites en France. Dans un article publié dans le Daily Mail du 30 septembre 2012, Peter Allen a laissé entendre que le colonel Kadhafi aurait été tué, « sur ordre de Nicolas Sarkozy, par un homme des services français ayant infiltré le groupe de rebelles libyens ». Selon le journaliste anglais, « Kadhafi avait été tué d’une balle dans la tête, et bien que son arrestation et sa mise à mort avaient été filmées, la vidéo était trop confuse pour permettre de comprendre quelles étaient les circonstances exactes de sa mort, et surtout, quel était son auteur ».
Peter Allen a étayé sa thèse par cette déclaration de Mahmoud Jibril, en 2012, sur une chaine de télévision égyptienne : « C’est un agent étranger qui s’est mêlé aux brigades révolutionnaires pour tuer Kadhafi ». Citant des sources diplomatiques à Tripoli rapportées par le quotidien italien Corriere Della Sera, Peter Allen a indiqué qu’il « est probable que le tueur étranger de Kadhafi soit français », en ajoutant que, « Depuis les débuts du soutien de l’OTAN à la révolution, fortement appuyée par le gouvernement de Nicolas Sarkozy, Kadhafi a ouvertement menacé de révéler les détails de sa relation avec l’ancien président de la France, incluant les millions de dollars payés pour financer sa candidature aux élections de 2007 ».
Toujours selon le Daily Mail, « Rami El Obeidi, qui était responsable des Affaires Etrangères pour le Conseil National de Transition qui a succédé au régime de Kadhafi, affirme qu’il était possible de suivre ce dernier (Kadhafi) à la trace au moyen de son système de télécommunications satellite, et que ses communications avec le président syrien Bashar Al-Assad ont été interceptées. Les experts de l’OTAN savaient que les communications venaient de Syrte, et que c’était donc l’endroit où le dictateur libyen avait trouvé refuge. Kadhafi avait été retrouvé par les rebelles libyens après que des frappes de l’OTAN aient attaqué un convoi dans lequel il se trouvait. Il s’était dissimulé dans une canalisation d’égout et c’est là que les rebelles se sont emparés de lui et qu’ils l’ont tué après l’avoir violenté ».
BHL, disciple d’Heidegger ou imitateur de Goebbels ?
C’est exactement cette version là que Bernard Henri-Lévy s’est empressé de vendre aux médias français qui lui sont acquis. C’était le soir même de l’assassinat de Kadhafi, le 20 octobre 2011. Sans avoir été annoncé par David Pujadas, le présentateur du journal du 20h sur France 2, BHL a surgi derrière les caméras et s’est installé sur le plateau qui recevait le ministre de la Défense, Gérard Longuet. Nous avons cherché la vidéo de cette séquence qui restera dans les annales, et dont voici le récit.
Lors de ce journal télévisé, France 2 venait de passer un document sur la capture et la mort de Kadhafi. Ne sachant pas encore qu’il s’agissait d’une affaire amenée à devenir un secret d’Etat, cette chaine publique laissait clairement entendre que dans sa « fuite », le cortège du guide libyen a été stoppé par un bombardement de l’aviation de l’OTAN, et que Kadhafi a été capturé par des militaires français, puis remis aux insurgés.
C’est à ce moment là que surgit BHL et avant même de s’asseoir, s’empresse de rectifier le tir de la balle qui a tuée Kadhafi ! Ce que Gérard Longuet, supposé ministre de la Défense, n’a pas eu le temps ou le réflexe de faire. Il ne disait rien, alors que BHL semblait être plus informé que lui, en tout cas plus bavard. Visiblement contrarié par le document qui venait de passer et par le commentaire de David Pujadas, BHL a laissé entendre qu’il ne faut pas dire n’importe quoi aux téléspectateurs et que, bien informé, sa version des faits est tout autre.
Le problème, ce soir là, c'est que les images contredisaient les récits. Sur France 2, des bouts des lèvres, David Pujadas l'a fait remarquer à BHL, qui venait d'avoir ses copains rebelles au téléphone et tirait de cette conversation une histoire aussi fantasmagorique que captivante : « Kadhafi se cachait dans une sorte d'égout. Il a cru que c'était des gens à lui qui approchaient. Il y a eu des échanges de tirs, et c'est à la suite de ces échanges de tirs que Kadhafi aurait été abattu. » Mais ces images qui ressemblent à un lynchage, demande Pujadas ? « Dans toutes les révolutions, il y a des moments de ce genre où le groupe en fusion devient beaucoup moins sympathique », a répondu le philosophe pathétique.
Conscient de l’enjeu capital que présentaient les circonstances de la capture et de l’exécution de Kadhafi, enjeu en termes d’image de la France, terre des droits de l’homme, BHL a passé les quatre jours suivants le 20 octobre 2011 à convaincre l’opinion française de sa version édulcorée. « Plus le mensonge est gros, plus il passe », disait le sinistre Joseph Goebbels. De journal en radio et d’une télévision à l’autre, BHL a ressassé la même chose, à savoir que Kadhafi a été arrêté par les rebelles, c’est-à-dire les mercenaires du Qatar, de la Grande Bretagne et de la France et que c’est par l’un d’entre eux qu’il a été abattu.
L’exception Daniel Schneidermann
Dans cette masse de journalistes caporalisés, il y a toujours quelques rares exceptions qui honorent, pas seulement leur métier, mais aussi la grandeur de la France. C’est le cas de Daniel Schneidermann, présentateur et producteur d’« Arrêt sur images ». Dès le 21 octobre 2011, il a publié sur le site de son émission ce papier sous le titre suggestif de « Kadhafi, BHL, et la question sans réponse » :
« Il n'y aura jamais de procès Kadhafi: cela n'arrange-t-il pas beaucoup de monde, des gouvernements occidentaux aux compagnies pétrolières ? Cette question que chacun se pose, Patrick Cohen la pose à BHL. Car BHL est là, ce matin, sur France Inter, on se réveille avec lui après avoir soupé hier soir en sa compagnie sur Canal+ et France 2. Qui dit Libye dit BHL (comme le regrette sur son compte Twitter Vanessa Descouraux, journaliste d'Inter plusieurs fois envoyée spéciale dans les révolutions arabes: "dommage, on aurait pu inviter quelqu'un qui connait la Libye et les Libyens.") Mais il faut que BHL soit là, pour éviter que les questions soient posées. Attention! avertit immédiatement BHL à l'adresse de Cohen. Vous êtes tout près de la théorie du complot ! Vous n'y êtes pas encore, mais vous vous approchez de la zone interdite. Kadhafi a été achevé par des jeunes gens sympathiques et un peu énervés, il faut les comprendre, je le regrette, tout le monde le regrette, le CNT le regrette, je le sais, je leur ai parlé, mais c'est ainsi, on ne fait pas d'omelette, etc. BHL n'interdit rien, ne censure rien, il n'est pas maire de Puteaux, il ne va pas tenter de faire acheter tous les exemplaires de France Inter dans les transistors, mais il est là, ce matin, pour borner les curiosités, en plein jour, au vu et au su de chacun, puisque c'est ainsi qu'il sied de procéder ».
Dans l’histoire, les mensonges d’Etat ne manquent pas. Ils sont même parfois nécessaires, précisément lorsqu’ils répondent à la Raison d’Etat. Encore faut-il qu’ils soient bien ficelés, bien étudiés et suffisamment crédibles. C’est a priori le cas de la capture de Saddam Hussein, le 14 décembre 2003, à la suite d’une trahison, comme cela a toujours été le cas chez les Arabes. Mais les Américains, qui sont passés maitres dans l’art de la désinformation et de la manipulation, ont été un peu plus intelligents que les assassins de Kadhafi. Ils ont arrêté Saddam Hussein pour le remettre à leurs mercenaires irakiens, ne le privant pas ainsi d’un procès, fut-il des plus iniques. Le colonel Kadhafi n’a pas eu droit à un tel « privilège », probablement parce que sa liquidation ne répondait guère à la sacro-sainte Raison d’Etat !
Nebil Ben Yahmed
Vidéo France Inter, Patrick Cohen dans le 7/9 sur France Inter, à 8h20 :
http://www.dailymotion.com/video/xlu0r1_bernard-henri-levy_news?start=264
Original en anglais de l’article signé par Peter Allen et publié dans le Daily Mail :
http://www.dailymail.co.uk/news/article-2210759/Gaddafi-killed-French-secret-serviceman-orders-Nicolas-Sarkozy-sources-claim.html