Tunisie : des incendies qui rapportent gros !


7 Juin 2014

En deux jours, 75 hectares sont partis en fumée. Il n’y a plus le moindre doute sur ces incendies criminels qui ont commencé dès les premiers mois de la « révolution des gueux », comme dirait le célèbre et mystérieux John Wayne. La Tunisie brûle. A qui la faute et à qui profite le crime ?


Un pompier tunisien luttant désespérément contre les flammes qui dévastent Ennahli, le poumon de la capitale.
Dans l’après-midi du 5 juin 2014, un incendie s’est déclaré dans la zone verte d’Ennahli, dans le gouvernorat de l’Ariana. Le lendemain, dans une déclaration à Mosaïque FM, Lassaad Lachaal, ministre de l’Agriculture, a estimé qu’il « y a eu un départ d’incendie dans 4 ou 5 points. Pour l’instant je ne peux pas affirmer que l’incendie était provoqué. Je laisse aux enquêteurs d’en déterminer les origines». Un peu plus tard dans la journée, il a confirmé qu'il s'agissait bel et bien d'un acte criminel selon les premiers éléments de l'enquête, ajoutant que « les premières estimations font état de 30 à 40 hectares de forêt brulée ».

A peine 24h après, un autre incendie s’est déclenché dans la région de Oued Manâa dans le gouvernorat de Jendouba. Selon les premières informations, l’incendie a ravagé 8 hectares et la protection civile aidée par les riverains ont tenté d’éteindre les flammes avant qu’elles ne se répandent  aux champs voisins. Des informations locales indiquent que cet incendie est d’origine criminelle : un différend opposerait deux familles à propos de ce champ. Le directeur régional de la protection civile de Jendouba, Mounir Riabi, a précisé dans la journée du vendredi 6  juin 2014 que l’incendie a ravagé 35 hectares et qu’il a été finalement maitrisé.

Implication de l’Etat islamo-mafieux

En juin 2013, on apprenait par la presse locale que dans le cadre du rapprochement entre l’empire néo-ottoman d’Erdogan et la suzeraineté tunisienne de Ghannouchi, un important projet industriel a été ratifié entre les autorités intérimaires et le groupe turc OSTIM. Troublante coïncidence, c’est dans la zone d’Ennahli qu’a été décidée l’implantation de ce projet industriel. Un quotidien local rapportait alors que «Le groupe OSTIM pense que l'emplacement de la zone industrielle est très adéquat à l'investissement dans le secteur des industries légères à valeur ajoutée selon les normes environnementales avec l'installation des petites et moyennes entreprises (PME) appartenant à des compagnies étrangères ». Seconde coïncidence, les principaux actionnaires du groupe OSTIM sont Ali Agaoglu, le magnat des travaux publics en Turquie, Baris Güler, le fils du ministre de l’Intérieur Mammer Güler, Kaan Caglayan, le fils du ministre de l’Economie, Zafer Caglayan et Bilal Erdogan, le fils de celui qui se faisait passer, jusqu’à il y a un mois, pour le monsieur vertu du monde musulman et pour l’incarnation de l’islamisme « modéré » !

Le 6 juin 2013, au sujet de ce projet industriel, African Manager rapportait que « L'Agence Foncière Industrielle (AFI) qui a déjà entamé l'aménagement de la première tranche de 100 ha de la zone, est en train de réaliser les études techniques ayant trait à l'aménagement de la zone, et appelle à opter pour des lotissements conformes aux normes techniques » ! Dans une dépêche de l’agence TAP, un responsable de l’AFI déclarait de son côté que « Le projet turc est hyper important et sa réalisation est tributaire d'une volonté politique qui permettra notamment d'abréger les délais des procédures administratives » ! Pour sa part, Ilhem Idoudi, la directrice régionale des domaines de l'Etat et des affaires foncières à l'Ariana, indiquait que « plus de 49 ha de la zone industrielle Ennahli sont toujours l'objet d'un litige malgré l'avancement considérable dans les procédures d'expropriation foncières au profit du projet » ! Toujours en juin 2013, Ilhem Idoudi faisait cette déclaration symptomatique : « Aucun problème ne se pose avec le ministère de l'agriculture notamment la direction des forêts ou le ministère de l'environnement, étant donné que la zone industrielle Ennahli est classée zone forestière selon le plan d'aménagement urbain de la municipalité de l'Ariana, approuvé en 1994 et les travaux réalisés par le ministère de l'environnement relatifs à la délimitation du parc Ennahli » (African Manager du 6 juin 2013).

C’est le 3 juin 2013 qu’une réunion ministérielle consacrée à la future zone industrielle d’Ennahli s’est tenue à la Kasbah, sous la présidence de Ridha Saïdi, ministre chargé du dossier économique auprès du premier ministre de l’époque, Hamadi Jebali. Le ministère du Développement et de la Coopération internationales a été alors chargé de coordonner avec les Turcs « pour le suivi du projet ». Quant au ministère des Domaines de l’Etat et des Affaires Foncières, on lui a confié la mission délicate de « trouver une solution aux problématiques foncières et actualiser les données du projet » ! Analysées et recoupées, toutes ces déclarations ne laissent aucun doute quant aux auteurs de l’incendie qui vient de détruire 40 hectares du parc vert d’Ennahli ! Aucun doute non plus sur le gouvernement islamo-mafieux de la troïka, qui a fait en trois ans ce que les trabelsi, Matéri, Chiboub et Mabrouk n’ont pas fait en trente ans.

Implication de la populace

Ces incendies criminels ne sont pas d’aujourd’hui. Ils ont commencé au moment de la « révolution des gueux » et du coup d’Etat du 14 janvier 2011 qui s’en est suivi. Les voyous et les criminels qu’on appelle révolutionnaires avaient commencé par brûler les postes de police, les administrations régionales, les écoles et même les crèches d’enfants. Pour tous ces crimes commis, leurs auteurs peuvent dormir tranquille : les malfrats de l’ANC qui se font appeler « élus du peuple » viennent d’adopter une loi considérant les actes de pyromanie et de dégradation de biens publics et privés ayant eu lieu entre le 17 décembre 2011 et le 28 février 2012 comme étant des « actes de bravoure » , non passible de poursuites pénales !

Le tout premier incendie s’est produit le 14 juillet 2011 dans la forêt littorale de Kerkouane qui s’étend sur 1800 ha, plus exactement à Dar chichou, située entre Hammam-Ghezaz et Kerkouane, dans le gouvernorat de Nabeul. En quatre jours, du 14 au 18 juillet 2011, 200 hectares ont été détruits. On avait alors accusé des groupes extrémistes, alors que beaucoup des habitants de Kélibia savaient que les auteurs de ce crime ignoble étaient des familles connues dans la région, qui ont profité de l’anarchie révolutionnaire et de la chute de l’Etat pour s’approprier des terres qui appartiennent précisément aux domaines de l’Etat.

Si certaines parcelles ont pu autrefois appartenir à ces familles, il convient de préciser que, dès les années 1920, par décret beylical approuvé par les autorités coloniales, ils ont été déclarés zone protégée pour utilité publique et afin de remédier au problème de l’ensablement. Les familles en question ont été dédommagées, soit en argent, soit en échange de terrains en zones urbaines. Comme beaucoup d’autres « bons » citoyens, les héritiers ont profité de l’hystérie révolutionnaire  pour provoquer des incendies criminels et s’approprier ces terres ? C’est en tout cas ce qu’ont affirmé plusieurs personnes et associations, notamment Farouk Ben Houria, secrétaire général de l’ONG Citoyenneté et démocratie. Abdelmajid Dabbar avait soutenu quant à lui que « Brûler des forêts pour s’approprier des terrains et construire illégalement est un phénomène assez répandu », en ajoutant que « les constructions sauvages sont malheureusement un phénomène généralisé en Tunisie, et le littoral ou les zones de forêts n’en sont pas exemptes. Je suis en contact avec l’Agence de protection et d’aménagement du littoral (APAL), et il y a beaucoup de cas. L’APAL a dressé de nombreux procès verbaux aux contrevenants mais n’a pas pu les faire appliquer. Les forces de l’ordre ont d’autres priorités ». On n’a pas non plus empêché les pyromanes et leurs complices de construire sur ces terres des villas somptueuses en bord de mer, y compris à Kélibia Al-Mansoura.
 
Il n’y a pas que le littoral de Kerkouane à avoir subi de tels dégâts irréparables. En 2011 et en 2012, des riverains ont été fortement soupçonnés d’avoir volontairement provoqué des incendies dans les régions de Bouchater (près de Bizerte), Hammam-Ghezaz, Dar Chichou (gouvernorat de Nabeul), ainsi que dans plusieurs endroits de Moknine à Zarzis, pour s’accaparer des terrains pieds dans l’eau.

D’autres riverains des forêts tunisiennes à l’intérieur du pays, des paysans qui ne craignaient plus la peur du gendarme, allumaient des feux de forêts pour d’obtenir un pâturage plus abondant et riche pour leurs cheptels. Ces « gueux », que les mercenaires de la « révolution du jasmin » ont persuadé que l’Etat était l’ennemi de la société, voulaient ainsi s’accaparer des terrains dont jouissaient leurs ancêtres avant la naissance de l’Etat moderne. En mettant le feu, ils voulaient ainsi changer le statut de la forêt en terrain de pâturage, qui n’est plus soumis aux lois forestières et qui devient par conséquent un bien de la populace.

Implication du lobby immobilier

On sait le respect d’Erdogan et de sa mafia islamiste à l’égard des espaces verts transformés en béton. En janvier 2014, une poignée d’écologistes Turcs s’est opposée à la destruction du parc Gezi, qui domine l’emblématique place Taksin à Istanbul. C’était le début des manifestations qui ont fait dix morts et 8000 blessés.

La copie conforme de l’AKP en Tunisie a appliqué un mode opératoire encore plus hard. On repère ce qui reste des espaces verts, on s’entend avec des entrepreneurs dans l’immobilier, on loue les services de groupes criminels pour y mettre le feu, puis on construit et on vend à prix d’or. Rien que sur la période du 1er mai au 26 août 2013, 218 incendies ont été constatés. Selon la Direction générale des forêts, le total des superficies détruites durant cette période est de 3950 hectares. Entre janvier 2011 et juin 2014, les superficies détruites par les incendiaires sont estimées à 14760 hectares.

Face à cette destruction programmée, plusieurs militants écologistes tunisiens ont essayé de se mobiliser. Le coordinateur de WWF en Tunisie, Faouzi  Maamouri a même décrété un « deuil de l’arbre » en novembre 2012. Il avait alors déclaré que « Si la situation continue à ce rythme, on risque d’ici 2015 d’anéantir tous les efforts de reboisement déployés par l’Etat depuis un demi siècle ».

La chanson d’Alpha Blondy, « Les salauds ont mis le feu au paradis » n’a jamais été aussi vraie. Les salauds, de l’opposition islamistes aux gauchistes, en passant par les cyber-collabos et les droit-de-l’hommistes, ont mis le feu à la Tunisie. Paieront-ils un jour pour leur Haute trahison et pour leurs crimes ?

Lilia Ben Rejeb

Une vidéo qui fait mal au cœur sur Ennahli qui brûle.
http://www.youtube.com/watch?v=K_BCVyvVyOM#t=71