Tunisie : Nadhir Hamada, un prisonnier politique oublié


19 Décembre 2013

Il fait partie des dizaines de ministres, directeurs et hauts cadres de l’ancien Etat national qui sont emprisonnés au nom de la pseudo-révolution du jasmin et au nom d’une justice transitionnelle qui est celle des traîtres contre les patriotes, qui ont loyalement servi leur pays. Aujourd’hui, le cas de Nadhir Hamada, ancien ministre de l’Environnement et du Développement durable.


Dès le début, et indépendamment de ce que la Justice aux ordres peut leur reprocher, nous avons pris la défense de tous les prisonniers politiques qui ont été incarcéré après le coup d’Etat islamo-américano-qatari du 14 janvier 2011, et qui sont toujours arbitrairement maintenus en prison malgré le dépassement du délai légal de détention. Nous avons plusieurs fois parlé de Rafik Belhadj Kacem, Ridha Grira, Ali Seriati, Mohamed Lamine El Abed, Mohamed Gariani, Abdallah Kallel, Abdelwahab Abdallah…Si ces trois derniers ont été relâché depuis, beaucoup d’autres sont toujours en détention. Par omission, nous n’avons pas évoqué le cas de Nadhir Hamada, emprisonné depuis près de deux ans. En réitérant notre appel aux familles et proches des détenus oubliés par certains médias, pour qu’ils nous alertent sur les cas de leurs proches et qu’ils nous envoient leurs dossiers judiciaires, nous présentons aujourd’hui le parcours professionnel et politique de Nadhir Hamada, arbitrairement emprisonné depuis mai 2012.

Titulaire d’un diplôme d’ingénierie civile, d’un diplôme d’ingénieur du génie sanitaire, et d’un doctorat en génie de l’environnement délivré par l’université de Lille en France, Nadhir Hamada a débuté sa carrière professionnelle en tant que professeur enseignant à l’Ecole Nationale des Ingénieurs de Tunis (E.N.I.T) et à l’école d’agriculture de Medjaz el Bab. C’est en 1992 qu’il a été promu ingénieur général de l’administration. Il a occupé diverses hautes fonctions dont successivement:

Outre ses fonctions au sein de l’administration publique, M. Hamada a pris part à de nombreuses manifestations scientifiques et associatives. Rapporteur de la conférence sur l’éducation relative à l’environnement (UNESCO. Tbilissi 1982), il a aussi participé au plan d'action sur la Méditerranée mis en place par l'université de Yale (États-Unis, 1986) et a été chargé de mission par l'Organisation arabe pour l'éducation, la culture et la science en 1986 afin d'évaluer l'état de l'environnement dans le monde arabe. Elu consécutivement en 2006, 2007 et 2008, il a assuré la présidence du groupe des conseils de ministres arabes de l'Environnement. Il a également présidé, en 2007, le groupe des pays africains dans le cadre du Programme des Nations Unies pour l'Environnement.

Président de l'Observatoire du Sahara et du Sahel (O.S.S) de 2003 à 2010, il a représenté la Tunisie durant 7 années consécutives avec mérite et a reçu –entre autres- le prix sur la mobilisation de l’eau (Système aquifère du Sahara Septentrional). La présidence de l’OSS menée par la Tunisie aura ainsi duré plus de 7 ans avant de s’achever en 2011, après la révolution tunisienne, au profit de l’Algérie.

Sous l’égide de M. Hamada, plusieurs programmes environnementaux avaient vu le jour. Le Ministère de l’environnement faisait alors du bien-être du citoyen ses priorités. Au cœur de ses préoccupations, le ministère s’était efficacement attaqué aux problèmes liés à l’assainissement, aux mauvaises odeurs, à la prolifération des moustiques, aux matières plastiques, à la qualité de l’air, aux inondations, à la gestion et la valorisation des déchets, aux zones humides et au littoral, etc. Diverses actions avaient été menées pour venir à bout des préoccupations du Ministère de l’environnement dont:
 
- La création de l’Agence Nationale de Gestion des Déchets (ANGed) en Aout 2005.
 - La création de la première banque de gènes africaine et arabe pour la préservation de l’héritage génétique de la flore en 2007.
 - La réalisation de multiples parcs urbains à l’échelle de la République depuis 2004 (Tunis, Zaghouan, Kasserine, Sidi Bouzid, Siliana, Tataouine, Djerba, Monastir, Bizerte…). Notant qu’entre 2008 et 2010, 33 parcs urbains ont été réalisés et mis à la disposition des collectivités locales.
 - L’amélioration de l’indice de surface verte par tête d’habitant dans les villes de 7.7 m2 par habitant en 2003 à plus de 16.8 m2 en 2010, progression équitablement constatée dans les différents gouvernorats.
 - La mise en place de 40 nouvelles stations d’épuration permettant d’améliorer le taux de raccordement au réseau d’assainissement à plus de 86 %.
 - L’augmentation du taux de maîtrise de la gestion des déchets à 90% grâce à la réalisation de 19 décharges contrôlées munies de 56 centres de transfert des déchets.
 - La réalisation d’un grand centre pour le retraitement des déchets industriels et des déchets sanitaires avec la contribution de l’Allemagne. Diverses études scientifiques ont également été menées en vue de la diminution de la pollution industrielle (Phosphogypse dans la zone de Gabès, SIAPE).
 - La promotion de l’énergie propre à travers de multiples coopérations internationales, notamment en matière d’installation de parcs Eoliens (Al-Alia, Bizerte), de panneaux photovoltaïques, l’usage des déchets organiques à l’instar de la Bio méthanisation comme source  d’énergie (Bio fuel au niveau du marché de gros de Tunis).
 - L’instauration du système public de collecte et de retraitement des huiles lubrifiantes usagées "Eco-Zit" en 2004.
 - La mobilisation de nombreux dons (une moyenne de 70 millions d’Euros par an) auprès d’organismes internationaux tels que le Fonds Mondial pour l’Environnement (GEF), le fonds coréen, l’AFD, le PNUD, KFW, l’Union Européenne ainsi que d’autres pays. Ces fonds ont contribué au financement de plusieurs projets ayant notamment pour buts: l’éradication des décharges sauvages, la valorisation des déchets, la bonification des taux d’intérêt, Taparoura, Siape (golfe de Gabès), la diminution de la pollution industrielle des mines de Gafsa et de Metlaoui, ainsi que le traitement de la pollution du lac de Bizerte, de la région de Siamet et de la région environnante à l’usine de cellulose et de papier à Kasserine.
 - Les emplois verts et l‘économie verte ont eu une place prépondérante dans l’activité du ministère de l’environnement sous M. Hamada, ce qui a permis la création de plus de 15 000 emplois directs au profit des jeunes diplômés dans le cadre des programmes de collecte des déchets plastiques dans les villes, les plages, etc, sans compter les emplois indirects créés grâce à une idée innovante qui consiste à collecter les bouteilles en plastique et à les vendre au centre de recyclage au prix affiché pour le kilo de plastique. Le « Réseau des amis de l’environnement, CHEB », lancé sous l’initiative personnelle de M. Hamada, s’inscrit dans la lignée des programmes de collecte des déchets en plastique. Ce programme a notamment permis la création de 300 petites et moyennes entreprises gérées par de jeunes diplômés qui n’avaient pas réussi à intégrer le marché du travail.
 - L’introduction de la Tunisie sur le marché du Carbone, marché initié dans le cadre du protocole de KYOTO, et  la vente de la première tranche de quota CO2 à la banque mondiale à partir des décharges contrôlées, ce qui a permis d’éradiquer les décharges sauvages.
 - L’instauration des systèmes de valorisation des eaux usées au niveau du secteur agricole à travers la création de périmètres irrigués par les eaux préalablement traitées (arbres fruitiers, céréaliculture, pâturages..).
 - Le lancement du programme de valorisation des déchets utilisés pour la production de BIOGAZ lui-même servant à la génération d’électricité (marché de gros de Tunis).
 - L’initiation aux techniques de recharge de la nappe phréatique par le recours aux eaux usées traitées dans les régions du Cap bon et du Sahel.
 - Diverses grandes études dont celles relatives aux études d’impact sur le port en eau profonde d’Enfidha, Aéroport d’Enfidha, zone logistique et zone touristique d’Enfidha afin d’estimer les conséquences des nouvelles installations sur le littoral.
 - L’étude et la mise en place de l’immense station d’épuration El Attar présentant un émissaire en mer long de 8 kilomètres dans une profondeur de plus de 30 m et un débit de 345.000 m3 par jour.

Nadhir Hamada, haut cadre de la vraie élite tunisienne, a travaillé avec ardeur, acharnement et patriotisme pour contribuer efficacement au progrès de son pays sachant saisir, depuis son poste de ministre de l’environnement et du développement durable, les opportunités pour mettre au point divers projets à grands potentiels. Tous les efforts fournis sur le plan environnemental durant les années 2003 – 2010 avaient valu à la Tunisie sa place de leader des pays africains, arabes et méditerranéens. Depuis le coup d’Etat du 14 janvier 2011, Tunis est devenue l’une des capitales les plus sales d’Afrique et du monde arabe. Sans parler de l'islamisme et du salafisme qui sont aussi une question d'hygiène ! TunisieSecret

Lilia Ben Rejeb