Sami Fehri, Nizar Bahloul …à qui le tour ?


28 Janvier 2013

Tunisie : Nizar Bahloul, le directeur de Business News, vient d’être condamné à 4 mois de prison pour un article publié en juillet 2011 sur une sombre affaire concernant Ahmed Ben Mustapha, l’ancien ambassadeur de Tunisie à Abu Dhabi. Après investigation, Tunisie-Secret soutient Nizar Bahloul et donne raison à Ahmed Ben Mustapha ! Explication.


Sans le moindre doute, la condamnation de Nizar Bahloul, directeur du journal online Business News, à quatre mois de prison est un énième message du gouvernement islamiste actuel à l’ensemble des journalistes jaloux de leur indépendance. Cette condamnation est de la même nature que l’affaire encore plus grave de Sami Fehri, le patron de la chaine de télévision Attounissia, arbitrairement détenu en prison depuis août 2012. Dans notre article sur cette dernière affaire, nous écrivions alors : « Pourquoi Sami el-Fehri a-t-il été jeté et maintenu en prison ? Selon nos informations, cet acharnement n’a strictement rien à voir avec des questions de malversation ou d’argent mal acquis. Les quatre dernières années, Sami el-Fehri n’était pas plus proche du régime que certains autres patrons de télévision. L’affaire est donc résolument politique. Et comme dans beaucoup d’autres dossiers de chasse aux sorcières, l’affairiste mafieux Kamel Eltaïef y a joué un rôle important. Mais il n’y a pas que lui. D’autres agissent dans l’ombre par vengeance, ou par esprit de concurrence dans le sens arabe et sous-développé du terme. Ils pensent ainsi consolider leurs positions sans se rendre compte qu’ils creusent leurs propres tombeaux. Car, lorsqu’on se met au service de la dictature, tôt ou tard, on se fait broyer par elle » (L.B.R., 10 décembre 2012).

Sans même savoir qu’une plainte courait encore contre lui, Nizar Bahloul a été condamné par le tribunal de l’Ariana pour cet article qu’il a publié en juillet 2011, « Que cherche à cacher le ministère des affaires étrangères ? » et dans lequel il relatait des accusations graves portées et colportées par des fonctionnaires contre l’ancien ambassadeur de la Tunisie à Abu Dhabi, Ahmed Ben Mustapha. On l’accusait d’avoir détourné une partie des salaires des fonctionnaires et des contractuels de l’ambassade à son profit. C’était avant la chute du régime. Nous sommes persuadés que cette affaire était une cabbale montée contre l’ancien ambassadeur. Connaissant bien les pratiques de l’ancien régime, on accrédite donc la thèse soutenue par l'universitaire Jalila Ben Mustapha, la sœur de l’ancien diplomate qui a été trainé dans la boue. Voici un extrait de son témoignage, publié aujourd’hui 27 janvier par nos confrères de Kapitalis :

« Lorsque Ahmed Ben Mustapha, diplomate de carrière et, nommé à son poste, seulement, en raison de sa compétence, comme pourraient le prouver ses collègues, l'a rejoint à Abou-Dhabi, il avait cru qu'il devait servir les intérêts du pays, et non, d'un clan. Ce n'est pas du tout ce que pensait le ministre des Affaires étrangères d'alors, Abdelwahab Abdallah qui ne l'a contacté que pour lui dire qu'il devait bien recevoir Jalila Trabelsi. Lors de la venue de cette dernière, Ahmed Ben Mustapha, pris pas son travail, a cru bon de lui envoyer le second de l'ambassade, ce qui l'a obligée à passer par la douane qui a constaté sur elle une très grosse somme d'argent. L'accueil de l'ambassadeur lui aurait évité cette procédure…Ceci a entraîné la fureur de cette dame et elle n'a eu aucune difficulté à monter M. Abdallah contre l'ambassadeur. Il a mis fin à sa mission et lui a ordonné de démissionner, s'il ne voulait pas aller en prison. Ahmed Ben Mustapha, fort de son innocence et de son bon droit, a affirmé qu'il n'était pas coupable, qu'il refusait de démissionner et qu'il était prêt à se défendre. C'est alors que le ministre lui a créé une affaire montée de toutes pièces, de mauvaise gestion administrative, en n'ayant, bien entendu, aucune difficulté à acheter la complicité du personnel de l'ambassade et, ceci, selon les méthodes bien rodées de l'ancien régime ».

Cette version des faits nous emble tout à fait crédible. Cela ressemble beaucoup aux pratiques "diplomatiques" de l'ancien ministre des Affaires étrangères, Abdelwahab Abdallah. Toutes les ambassades tunisiennes, particulièrement celle de Paris, étaient au service des familles à chacun de leurs déplacements à l’étranger. Accueil royal à l’aéroport, voitures diplomatiques à leur service, agents des ambassades pour assurer leur sécurité…C’était l’époque où certains diplomates confondaient les intérêts supérieurs de l’Etat et les intérêts inférieurs des familles.
Tunisie-Secret.com

Lilia Ben Rejeb