Mezri Haddad ou les raisons de celui qui a tort


17 Décembre 2013

A la surprise générale, il a soutenu il y a deux jours Mehdi Jomaa, dont certains crédules apprennent aujourd’hui qu’il a été désigné par Washington et ses alliés européens. Que signifie ce retournement de veste de la part d’un homme qui a été le premier à dénoncer les ingérences étrangères et à considérer le printemps dit arabe comme « une vaste conspiration néocolonialiste » ? S’agit-il d’un revirement politicien à des fins carriéristes, ou d’un aveu d’échec d’un homme que les islamistes ont eu à l’usure ?


Dès que nous avons lu son article sur sa page facebook, qui a été immédiatement repris par plusieurs sites d’information, nous avons été les premiers surpris et les premiers indignés, mais nous avons préféré ne rien dire en attendant d’en savoir davantage. Ce n’est un secret pour personne qu’au sein de notre équipe, Mezri Haddad jouissait d’un respect et d’une estime que nous lui avons témoignée  dès le lancement de Tunisie-Secret. Mais cette estime vient d’en prendre un coup, et c’est le moins qu’on puisse dire.

Nous n’avons pas attendu les «révélations » bien tardives du Monde (17 décembre 2013) pour savoir que « les Occidentaux ont pesé de tout leur poids dans le choix du nouveau premier ministre tunisien, Mehdi Jomâa » et que « les principaux ambassadeurs de l'Union européenne et celui des Etats-Unis se sont réunis début décembre à Tunis » et « se sont mis d'accord pour promouvoir la candidature de M. Jomâa, ministre de l'industrie dans le gouvernement Larayedh ». Nous savions depuis longtemps que le fameux et fumeux « dialogue national » se faisait beaucoup plus entre les chancelleries occidentales qu’entre la troïka et le quartet. Et Mezri Haddad ne l’ignore pas puisqu’il le disait et le répétait depuis le début de ce « dialogue », aussi bien sur sa page facebook que sur les ondes de Jawhara FM. Pourquoi donc un tel revirement à 190 degré ?

On pose la question parce que le fait d’avoir pris un verre avec Mehdi Jomaa dans une brasserie parisienne, ou le fait d’apprécier son frère Ghazi Jomaa, ancien ambassadeur de Ben Ali à New York, ou encore le fait d’être l’ami de son oncle, Mohamed Masmoudi, ancien ministre de Bourguiba, ne justifient en rien un tel revirement. Ce sont des arguments qui peuvent convaincre des amateurs en politique, mais pas nous. Tant qu’à faire, Mezri Haddad aurait pu ajouter un quatrième « argument » : les origines sahéliennes de Mehdi Jomaa et le soutien efficace mais discret dont il a surement bénéficié de la part de Hamed Karoui, Kamel Morjane, Rachid Sfar et Tahar Belkhodja…tous des sahéliens comme lui !

Si on exclu les pressions –connaissant l’homme, nous savons que cela ne lui fait ni chaud ni froid-, il ne reste que deux explications : soit l’opportunisme politicien, soit l’usure. Dans le premier cas, le vieux renard montrerai patte blanche aux Américains et aux islamistes pour obtenir un poste politique ou réintégrer la diplomatie tunisienne. La manœuvre serait subtile mais elle démontrerait le degré zéro d’une « élite » politicienne qui n’a ni éthique ni principe.

Dans le deuxième cas, celui de l’usure, on pourrait supposer que Mezri Haddad jette l’éponge parce qu’il a atteint ses limites…aussi bien politiques que matérielles ! Avec Skander Khélil, son ami de vingt ans (voir son témoignage ci-dessous), nous sommes les rares à connaitre la situation financière de cet ancien ambassadeur. Criblé de dettes, encerclé par certains Français qui ne sont solidaires qu’avec les Arabes de service, suivi de près par le puissant lobby qatari qu’il a traîné dans la boue et même devant la justice, nous sommes effectivement persuadés que Mezri Haddad ne tient plus le coup.

On peut comprendre la souffrance de ce père de famille dont les positions patriotiques ont rendu espoir et fierté à beaucoup de Tunisiens. Mais est-ce une raison pour sauver sa famille en abandonnant sa Patrie ? Est-ce une raison d’abandonner le combat au moment où l’Histoire lui donne raison et où des milliers de Tunisiens font confiance à ses analyses et adhèrent à ses positions ? Tous le monde sait que Mehdi Jomaa est le candidat de l’Amérique et de ses sous-traitants européens. Pourquoi donc lui apporte t-il sa caution morale ? C’est à lui de répondre à cette question que tous ses amis et supporters se posent, encore faut-il qu’il réponde à nos multiples coups de téléphones !TunisieSecret

Karim Zmerli   

Skander Khelil revele la face cachee de Mezri Haddad