Lorsque le destin de la Tunisie se joue dans une chambre d’hôtel à Paris


20 Aout 2013

Les secrets de la rencontre entre BCE et Rached Ghannouchi à Paris. Cette rencontre s’est déroulée dans un hôtel parisien à quelques mètres des Champs Elysées. La rencontre aurait été arrangée par Nabil Karoui, le polytechnicien de Béji et Slim Riahi, l’énarque de Noé (Ghannouchi), sous instruction d’officines extranationales. C’était une manœuvre, ou plus exactement un piège tendu au chef d’Ennahda pour polir encore plus l’image de Béji Caïd Essebsi, qui sera bientôt présenté dans les médias comme « l’homme qui a dit non à Ghannouchi », pour paraphraser le célèbre cybercollabos Yassine Ayari, au sujet du sergent 5 étoiles, Rachid Ammar. Je parie dès à présent qu’un enregistrement bien sélectionné de cette rencontre sera bientôt diffusé sur internet avec le rôle d’amant pour Béji et celui de cocu pour Ghannouchi. Signe de la décadence tunisienne, le destin de la Tunisie se décide dans une chambre d’hôtel à Paris, avec comme courtiers ou entremetteuses Nabil Karoui et Slim Riahi qui, tel un gamin fier, s’est empressé de publier sur sa page facebook les photos de cet « événement capital ». L’article suivant est de Soufiane Ben Farhat, publié sur son blog le 19 août 2013


La rencontre secrète à Paris entre Béji Caïd Essebsi (BCE) et Rached Ghannouchi est pour le moins déconcertante. Secrète, elle l’est demeurée trois jours durant, jusqu’à ce qu’elle soit ébruitée. Un officier félon de l’un des deux camps serait-il à l’origine de la fuite ?

Du coup, de part et d’autre, grand embarras et branle-bas de combat. A dire vrai, on est à l’étroit. Pris en flagrant délit de cachoterie politique, les deux dinosaures de la politique tunisienne encore en lice commettent une gaffe à fragmentations pour ainsi dire. A l’instar de ces bombes qui explosent avant d'atteindre la cible en libérant des milliers d'éclats dans des directions aléatoires.

D’abord pourquoi se sont-ils rencontrés à Paris, précisément ? Parodieraient-ils d’aventure le Duc Tho et Henri Kissinger en pourparlers de paix dans la capitale des lumières en vue de l’indépendance du Vietnam ? Auquel cas, lesdites négociations ayant eu lieu de 1968 à 1973, ils se tromperaient d’époque, de lieu et d’enjeu.

Et puis Paris, Paris, eh quoi Paris ! Le complexe du colonisé serait-il encore de mise ?  Ces dernières semaines, on a observé beaucoup d’interférences étrangères dans la politique tunisienne. Des ambassadeurs occidentaux y travaillent d’arrache-pied. Des ministres européens ne sont guère en laisse.

Américains, Français, Allemands plus particulièrement et bien d’autres jouent les premiers violons dans ce concert sinistre. Soit les mêmes qui interviennent dans l’engrenage de la mort en Syrie. A coups de sommes colossales d’argent sale, d’armes, de mobilisation et d’entraînement de troupes, de grenouillage et de services de renseignement impliqués directement dans le conflit. Seraient-ils si tranchants et maléfiques en Syrie et magnanimes voire philanthropes en Tunisie ?

Pourquoi les dirigeants des deux principaux partis politiques tunisiens sont-ils engagés dans ces pourparlers extravertis ? Les questions fusent. Les réponses sont évasives. Quelqu’un susurre que Ghannouchi a fait le déplacement de Paris parce que BCE y serait malade. Or, les pourparlers sont fortement déconseillés aux malades. D’autant plus que deux jours avant la rencontre, Nida Tounès avait publié un communiqué démentant une rencontre entre BCE et Ghannouchi.

Toujours est-il qu’il semble qu’un émissaire de l’Union européenne aurait fait savoir à BCE juste avant son départ pour Paris que Ghannouchi voudrait bien le rencontrer. A Paris précisément, Ghannouchi aurait proposé à BCE trois scénarii :
- un gouvernement d’union nationale, refus de Béji Caïd Essebsi.
- un gouvernement de compétences nationales présidé par Ali Laarayedh. Re-refus de BCE.
- maintien de l’Assemblée constituante jusqu’au 23 octobre 2013, suivi de la mise en place d’un gouvernement de technocrates qui superviserait les élections. Troisième Niet.

Et puis qu’y a-t-il derrière tout ça ? On parle d’arrangements secrets, de safa9ate, de calculs de boutiquiers, du genre "je te donne ceci, tu me concèdes cela" (3andikchi 3andi). On sait que BCE avait été profondément effarouché d’avoir été floué par Ennahdha, qui lui avait promis la présidence de la République avant de tourner casaque. La magistrature suprême pourrait bien avoir été proposée de nouveau au chef de Nida Tounès, en plus de quelques portefeuilles ministériels. En contrepartie, son mouvement s’attèlerait besogneusement à la sortie de crise. Ennahdha serait ainsi quitte d’une crise qui pourrait lui en coûter énormément.

Selon certaines sources, le patron de Nida Tounès a confié à un haut responsable du front populaire avant son départ pour Paris qu’il serait coûteux pour quiconque qui s’aviserait de rebrousser chemin. Et Nida Tounès s’est empressé hier de faire valoir que BCE s’accroche aux fondamentaux du Front du Salut. Oui mais pourquoi s’est-il entêté à cacher un haut fait et une attitude honorable ? On parle de désaccord fondamental sur le communiqué final de la rencontre. Il n’est sorti qu’au bout du troisième jour, qui plus est on ne peut plus laconique.

Qu’en pensent l’Ugtt, l’Union pour la Tunisie, le Front du Salut, le CPR, fidèle allié d’Ennahdha et farouche compétiteur de Nida qu’il accuse d’incarner la vieille garde contre-révolutionnaire ? Et le président Moncef Marzouki dans tout ça ?

Un aveugle sicilien que tout le monde appelait Mastru Pietru avait prononcé une phrase devenue proverbiale le 10 juin 1940. Devant une fontaine publique, des femmes qui attendaient leur tour pour puiser l’eau l’interrogèrent sur la guerre que Mussolini avait déclarée ce jour-là à la France et à l’Angleterre. Il répondit : "J’ai beau être aveugle, je vois bien qu’elle est noire". Tunisie-Secret.com

Soufiane Ben Farhat