Jacques Myard accuse Laurent Fabius d’avoir « mis la France hors-jeu sur la scène internationale »


17 Février 2016

A l’Assemblée nationale, lors de la séance « Questions au gouvernement » du 16 février 2016, le Député du groupe Les Républicains a interpellé le nouveau ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault en des termes peu diplomatiques. Ces critiques de l’ancien chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, au sujet du dossier syrien sont certes fondées, mais Jacques Myard a tendance à oublier que son président Nicolas Sarkozy a fait pire en Libye et n’aurait sans doute pas fait mieux en Syrie, tant la politique étrangère de la France est devenue la caisse de résonance du Département d’Etat américain !


Jacques Myard, Député Les Républicains de Nicolas Sarkozy !
M. le président. La parole est à M. Jacques Myard, pour le groupe Les Républicains.

M. Jacques Myard. Monsieur le Premier ministre, ministre des affaires étrangères, je suis, je vous l’avoue, admiratif du courage donc vous faites preuve en succédant à celui qui a mis la France hors-jeu sur la scène internationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.) Votre mission est quasiment mission impossible si vous continuez dans la voie tracée, celle de l’idéologie et des postures moralisatrices.

Comprenons-nous bien, monsieur le ministre : comme le souligne Max Gallo – qui est un homme de gauche, mais réaliste –, nous sommes tous pour les droits de l’homme, mais ils ne sont pas une explication du monde. Cela est particulièrement vrai quand on fustige d’un côté, et de manière sélective, tout en se montrant sourd et aveugle de l’autre, comme envers l’Arabie Saoudite – pour prendre un exemple au hasard.

Oui, la France est hors-jeu au Proche-Orient où, comme cela vient d’être rappelé, la tournure des événements prend une dimension tragique et hyper-dangereuse, avec notamment la politique aventureuse de la Turquie à l’égard des Kurdes et de la Syrie. La Syrie, où votre prédécesseur saluait devant la presse le bon travail – sic et re-sic ! – d’Al-Nosra, filiale d’Al-Qaïda.

M. Claude Goasguen. C’est vrai !

M. Jacques Myard. La Syrie, où nous nous privons, par idéologie, de sources de renseignements sur les terroristes de l’État islamique, notre ennemi, faute de relations diplomatiques avec Damas. Quant aux sanctions contre la Russie, croyez-vous qu’elles feront plier Moscou, alors qu’elles pénalisent nos intérêts ?

Mes questions sont donc simples : allez-vous réexaminer notre politique étrangère à l’égard de la Syrie et de la Russie, dans l’intérêt bien compris de nos intérêts, mais aussi face à la nécessité de trouver des solutions politiques à ces conflits qui n’ont que trop duré, en renonçant au suivisme et aux postures idéologiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

M. Jean-Marc Ayrault, Monsieur le député, je ne me lancerai pas dans un exercice théorique. L’objectif est clair : il faut que la guerre en Syrie cesse. (« Bravo ! » et rires sur les bancs du groupe Les Républicains.) Cela passe effectivement par un engagement international, qui exige en effet lucidité et sens des réalités. Il faut parler avec tout le monde. Vous avez évoqué la Russie ? Bien sûr que nous parlons avec la Russie de la situation en Ukraine et en Syrie.

M. Claude Goasguen. Et les Kurdes ?

M. Jean-Marc Ayrault, En même temps, nous avons des exigences, qui sont aujourd’hui le respect des engagements pris à Munich, où la Russie, comme d’autres partenaires, s’est engagée à l’arrêt des hostilités et des bombardements...

M. Claude Goasguen. Et les Turcs ?

M. Jean-Marc Ayrault, ...pour l’accès à l’aide humanitaire. Ce n’est tout de même pas faire du sentimentalisme ou de droit-de-l’hommisme que de dire que des millions de personnes sont aujourd’hui sous les bombes et, faute d’autres solutions, n’ont que celle de fuir et de devenir des réfugiés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

Alors, oui, il faut être clair et ferme. L’engagement est pris. Bien sûr qu’il faut discuter avec tout le monde, y compris avec la Turquie – ce que nous faisons, en bonne intelligence. Nous nous disons les choses, y compris à propos de ce qui s’est passé il y a quelques heures.

Mais nous voulons aussi aider ces pays – la Jordanie, le Liban, dont je rencontrerai dans quelques instants le ministre des affaires étrangères. C’est le sens de la conférence de Londres, qui prévoit 10 milliards d’euros d’aide, dont 3 milliards venant de l’Europe et dont une partie ira la Turquie, une partie au Liban et une partie à la Jordanie.

Si nous voulons trouver des solutions pour les réfugiés qui arrivent massivement, il faut se battre avec détermination pour arrêter les bombardements, apporter une aide humanitaire et engager un processus politique de négociation, qui doit reprendre à Genève le plus vite possible. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

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