Il y a déjà quatre mois, un informateur anonyme nous a envoyé un long texte démontrant l’implication de certains membres d’Ennahda dans la fabrication de fausse monnaie et trafic de devise. Mais aucune preuve matérielle, aucun document, n’a été jointe à cette information. Malgré mon insistance, notre comité de rédaction a par conséquent décidé de ne pas en faire état.
Mais ces derniers temps, la « rumeur » s’est faite insistante. J’ai alors décidé d’investiguer et les informations que j’ai pu récolter me mènent à penser que cette affaire est encore plus grave que ce que je pensais. Elle est plus grave que les réseaux terroristes, les trafics d’armes, la base américaine de Remada, ou la vente de nos meilleures entreprises étatiques à certains émirats du Golfe. En fait, mon informateur ne s’est trompé que sur une chose : la monnaie n’était pas fausse mais authentique !
En effet, il ne s’agit pas de fabrication clandestine ou d’un trafic « ordinaire » de fausse monnaie, comme les polices en démantèlent tous les jours, partout dans le monde. Il ne s’agit pas non plus d’une décision souveraine et responsable de la BCT de faire tourner la planche à billets, comme cela arrive dans certains pays, y compris d’Europe, pour relancer l’économie par stimulation monétaire. C’est plus complexe, plus subtil et plus grave : en réalité, les billets imprimés ne sont pas des coupures contrefaites, et la BCT n’a pas officiellement autorisée la fabrication de telles quantités de billets, mais elle n’a rien fait pour empêcher cette pratique, qui était tolérable et « légale » au départ –soi-disant pour retirer de la circulation les vieux billets- mais qui a pris ces derniers temps des propensions mafieuses, au risque d’un effondrement total et irréversible de l’économie tunisienne. Pour être plus clair, il y a eu emballement de la machine à monnaie, puisque la quantité de nouveaux billets émis est de loin supérieure à celle des « vieux » billets retirés de la circulation !
Les raisons et les risques de la planche à billets
Généralement, c’est en cas de crise ou de récession économique que les Etats recourent à la planche à billets, ou « quantitative easing ». C’est que la planche à billets est le plus facile remède à la déflation. A condition qu’elle soit raisonnable et que le volume d’argent corresponde toujours à la réserve en or, cette politique anti-déflationniste par stimulation monétaire, permet théoriquement à l’économie de repartir, par incitation aux emprunts et à la consommation. Ces trois dernières années, les Etats-Unis, le Japon et même la Banque centrale européenne (BCE) ont pratiqué cette politique non-conventionnelle qui consiste à accroitre la masse monétaire. C’est notamment par ce moyen très commode que l’Europe a pu secourir l’économie grecque et soutenir l’économie espagnole.
Cependant, même pour des puissances économiques comme les Etats-Unis, ou le Japon, ou l’Europe, le recours à la planche à billets est un remède qui peut parfois se révéler plus nuisible que le mal, à savoir la déflation, qui est un cycle destructeur d’emplois. Cette politique peut déboucher sur une bulle monétaire difficilement contrôlable. A plus forte raison pour un petit pays comme la Tunisie. L’injection à outrance d’argent entraine ipso facto une dévaluation de la monnaie locale. Le plus grand risque est évidemment l’inflation paroxystique, c'est-à-dire le stade où la monnaie locale n’a plus aucune valeur réelle. Ce fut le cas de l’Argentine en 1991 et surtout de l’Irak sous blocus, lorsque les commerçants n’utilisaient plus les calculatrices mais les balances à peser. Pour 1Kg de patte, 3Kg de billets, et pour 1Kg de sucre, 5 Kg de billets ! En termes plus clairs, ce que la troïka fait depuis des mois, avec un Chedly Ayari pris en otage, peut provoquer un double effondrement : un effondrement monétaire et un effondrement économique.
Un secret bien gardé
Selon le gouverneur de la BCT -qui devait démentir la fameuse « rumeur »-, de nouveaux billets ont été effectivement mis en circulation pour « remplacer les billets rendus inutilisables à l’usage et qui doivent être retirés de la circulation ». C’est totalement faux, ou plus exactement, c’est l’arbre qui cache la forêt. On a injecté de l’argent principalement pour combler le très important déficit budgétaire, et pour donner l’illusion que l’économie tourne et que l’argent coule à flot. C’est en effet le cas, sauf que cet argent est une monnaie de singe ! C’est-à-dire qu’elle n’a pas de valeur réelle, qui correspond à une richesse produite ou induite. Lorsque la banque centrale japonaise ou européenne actionne la planche à billets, elle le fait de manière rationnelle, ponctuelle et, surtout, proportionnelle aux richesses du pays, à son potentiel économique, à ses réserves en or. En Tunisie, on a imprimé de l’argent pour colmater les brèches, pour retarder un crash inexorable, sans tenir compte des normes nationales et internationales. Mais, comme on le constatera plus loin dans cet article, une partie de cette vraie fausse monnaie servirait au financement d'activités extra-lègales et mafieuses.
D’ailleurs, dans son interminable communiqué intitulé « Précisions de la BCT sur la Politique Monétaire » http://www.bct.gov.tn/bct/siteprod/documents/precisions_fr.pdf, la Banque Centrale n’évoque pas du tout l’histoire du remplacement des vieux billets, mais invoque une raison plus crédible : le manque de liquidités bancaires. Nous y voilà ! Plus bizarre et plus symptomatique encore, l’auteur du communiqué de la BCT affirme « catégoriquement que les statuts de la Banque ne permettent pas l'utilisation de la planche à billets » ! Effectivement, cela n’est pas autorisé, selon l’article 47 bis de la loi fixant les statuts de la BCT.
Une économie dévastée
Les initiés, notamment la présidente de l’UTICA, le secrétaire général de l’UGTT, les banquiers et le milieu des affaires le savaient déjà depuis des mois : avec un endettement de 51% du PIB (et non pas 48%, comme ils disent), alors qu’il était de 37% en 2010, avec une inflation de 12% (et non pas 5,6%, comme ils disent), avec toutes les entreprises étrangères et même tunisiennes qui ont délocalisé ailleurs, principalement au Maroc, l’économie tunisienne a franchie la ligne rouge, c’est-à-dire qu’elle est sur la pente de la récession. Par rapport au surendettement actuel, et compte tenu de la population tunisienne, il faut savoir que chaque nouveau né tunisien arrive au monde avec une dette de 20 000 dinars! Qui plus est, les emprunts contractés depuis janvier 2011 ne servent pas à l'investissement mais à la consommation.
La note souveraine de la Tunisie a été revue à la baisse à deux reprises, depuis le 14 janvier 2011 (de BBB avec perspective stable, à BBB- puis à BBB- avec perspectives négatives). En outre, après avoir abaissé la note de la dette de la Tunisie, l’agence de notation Standard&Poors a publié un rapport en janvier 2012, qui indique que le déficit budgétaire de la Tunisie atteindrait les 9% du Produit Intérieur Brut (PIB) en 2012. Standard&Poors prévoyait par ailleurs une augmentation du taux d’endettement de la Tunisie pour atteindre les 50% en 2013. Nous y sommes et même plus, puisque ce taux est arrivé à 51%. En juillet 2012, l'Agence de notation Moody's a fait part de ses inquiètudes quant à la stabilité macro-économiques de la Tunisie. Une manière policée pour dire que l'économie du pays s'est effondrée et que son maintien est purement artificiel.
Interviewé par le magazine d’expression arabe Al- Maghreb, en date du 9 septembre 2013, Samir Bettaïeb, membre de l’Assemblée Constituante, a déclaré que madame Wided Bouchamaoui (UTICA) lui a exposé la situation économique du pays qui l’a laissé perplexe. Selon Bettaïeb, « Dans les deux mois qui viennent, l’Etat sera incapable de verser les salaires des fonctionnaires ». En réalité, selon nos sources, c’est depuis janvier dernier (2013) que l’Etat n’est plus en mesure de payer les salaires des fonctionnaires et de financer les grands projets. S’il a pu le faire jusqu’à présent, c’est précisément grâce à la planche à billets. En d’autres termes, ce n’est ni pour éviter la déflation, ni pour réactiver l’économie, mais pour maintenir en survie artificielle un Etat en faillite.
Démagogie et omission de Chedly Ayari
En janvier dernier, précisément, le gouverneur de la Banque centrale affirmait que « la liquidité du trésor public permet d’assurer la paie de plusieurs mois ». En Août dernier, il réitérait ce mensonge lors d’un entretien pour African-manager en précisant qu'il est « ridicule de dire que l’Etat tunisien est incapable de payer les salaires », assurant qu’il « n’y a aucune crainte à ce sujet », et que « sauf catastrophe, il n’y a pas de raison de penser que les recettes programmées par l’Etat pour 2013 ne rentreront pas ,d’ici la fin de l’année dans les caisses de l’Etat ». Si Chedly Ayari gère la BCT comme il a géré la BAD (Banque africaine de développement), on peut être sûr du résultat !
Le quotidien Attounissya, dans son édition du 6 septembre dernier, a indiqué que «le SG a exprimé des craintes quand à la décision de la BCT d’imprimer de nouveaux billets et de les mettre en circulation». Attounissya a cité un professeur d’économie qui a expliqué que «ce procédé est normal et que cela est une sorte de prêt que fait la BCT au gouvernement pour l’aider à faire face à des dépenses comme celles des salaires».
Professionnels et sérieux, nos confrères d’African-Manager ont voulu en savoir davantage en interrogeant le gouverneur de la BCT. Chedli Ayari a répondu que «les textes interdisent à la BCT de prêter de l’argent à l’Etat » et la banque ne l’a pas fait. Il a précisé ensuite que « la BCT n’imprime de nouveaux billet que pour remplacer les billets rendus inutilisables à l’usage et qui doivent être retirés de la circulation ».
Selon les dires de Chedly Ayari, la masse monétaire nouvellement imprimée a concerné 23 millions 200 mille coupures de 50 DT, le retrait de 47 millions 677 milles coupures de 30 DT et 172 millions 840 mille coupures de 20 DT. A la BCT, écrit African Manager, « on nous assure aussi, que toute impression de nouveaux billets se fait sur décision du conseil d’administration, que cette décision remonte à 2011… que la BCT n’actionne pas la planche à billets lorsqu’elle le veut ou lorsque le gouvernement le lui demanderait. C’est certes en fonction du stock de billets et de son état, mais c’est toujours sur une décision actée au sein de son Conseil d’Administration et donc jamais sous cape ». Contraint de se justifier, le gouverneur de la BCT a assuré que cette injection n’a et n’aura aucun effet sur la masse monétaire actuellement en circulation dans le pays, précisant que «cette masse était, à la date du 3 septembre 2013, de 7630 MDT et elle est suivie comme le lait sur le feu et reste stable depuis des mois».
A moins qu’en une semaine la planche à billets ait été encore actionnée, le montant de la masse monétaire nouvellement imprimée n’est pas de 23 millions 200 mille coupures de 50 DT, mais quasiment le double, c’est-à-dire 44 millions 300 mille coupures de 50 DT. A la date d’aujourd’hui, la masse monétaire en circulation est de 11 820 MDT, et non pas 7630 MDT. Une simple soustraction permet de constater qu’il y a 4191 MDT non déclarés, qui auraient été versés sur des comptes appartenant à des membres d’Ennahda, dans les banques suivantes : BH (Banque de l'Habitat), Banque Zitouna, Tunisian Qatari Bank, Al-Baraka et la Banque tuniso-libyenne. Selon nos informations, cet argent servirait à financer certains réseaux parallèles de l’Etat et certaines filières terroristes, ainsi qu'à engraisser certains agents sécuritaires de la Présidence et de l'Intérieur, notamment la "police parallèle", dont Walid Zarrouk a révélé l'existence et les turpitudes: connexions avec des groupuscules terroristes, liens avec des narco-trafiquants...Même si nous ne sommes pas en mesure d'affirmer ces informations, on lance un appel à nos confrères tunisiens pour complèter notre investigation, en demandant tout simplement aux banques citées les noms des personnes ou des sociétés qui ont ouvert ces comptes dans les différentes banques citées.
Des criminels à la tête d’un Etat voyou
On le constate à tous les niveaux et dans tous les ministères, les islamistes et leurs alliés de la troïka ne se comportent pas comme des responsables soucieux de l’avenir immédiat du pays, mais comme des voyous qui considèrent l’Etat comme leur bien propre. En somme, la planche à billets serait un butin de guerre. Ou bien on emprunte à l’étranger, ou bien on imprime nous même l’argent, ce qui revient d’ailleurs à une forme d’emprunt, puisqu’en injectant de nouveaux billets, la BCT est sensée prêter de l’argent à l’Etat ! C’est à cela que se résume la « stratégie » économique des voyous qui sont au pouvoir.
Pourquoi la BCT s’est-elle aussi gravement compromise ? Pour répondre à cette question, il faudrait poser une autre : pourquoi Mustapha Kamel Nabli a-t-il été démis de ses fonctions en juillet 2012, et selon quels critères l’a-t-on remplacé par Chedly Ayari ? C’est le larbin de Rached Ghannouchi, à savoir Moncef Marzouki, qui a répondu à l’époque dans ces termes, lors d’une allocution télévisée : « Cette décision reflète un attachement à ce que l’Assemblée constituante exerce ses responsabilités en engageant des réformes profondes du secteurs monétaire et financier ». L’ensemble des analystes avaient relevé le côté ridicule de l’argument Tartourien, puisque les compétences de Mustapha Kamel Nabli ne sont pas comparables à celles auxquels le président provisoire prétendait confier un secteur aussi important, à savoir les « élus du peuple », comme Meherzia Labidi, Samir Ben Amor, Abderraouf Ayadi, Sahbi Atig, Mohamed Abbou, Walid Bennani, Habib Ellouze, Sadok Chourou…Quant à l'argument suivant lequel Mustapha Kamel Nabli est un homme de l'ancien régime, on rappelle que son successeur a toujours été proche du pouvoir, jusqu'à sa nomination par Ben Ali comme Sénateur (2010).
Ce n’est pas un « élu du peuple » qui a remplacé l’ancien gouverneur de la BCT, mais l’élu de Rached Ghannouchi, fortement appuyé par Mustapha Ben Jaafar, ami et voisin (à Gammarth) de Chedly Ayari. En fermant les yeux sur la planche à billets, ce dernier se rend complice d’un crime contre les intérêts supérieurs de l’Etat et contribue au maintien en poste de ce gouvernement corrompu et incapable, qui a détruit en moins de deux ans les acquis de 25 ans. Il n’y a aucune politique ou stratégie économique en Tunisie, mais juste des subterfuges monétaires palliatifs, couvrant volontairement ou involontairement des pratiques criminelles et mafieuses, qui mènent le pays à la faillite économique totale et au chaos social. Le devoir de Chedly Ayari est de sortir de son mutisme, de parler vrai, sans tenir compte des pressions de la mafia qui est au pouvoir, avec à sa tête Rached Ghannouchi, ni des réprimandes du Tartour qui l'a reçu aujourd'hui et qui n'en a plus pour longtemps! TunisieSecret
Karim Zmerli, avec l’éclairage du professeur J.Z
Mais ces derniers temps, la « rumeur » s’est faite insistante. J’ai alors décidé d’investiguer et les informations que j’ai pu récolter me mènent à penser que cette affaire est encore plus grave que ce que je pensais. Elle est plus grave que les réseaux terroristes, les trafics d’armes, la base américaine de Remada, ou la vente de nos meilleures entreprises étatiques à certains émirats du Golfe. En fait, mon informateur ne s’est trompé que sur une chose : la monnaie n’était pas fausse mais authentique !
En effet, il ne s’agit pas de fabrication clandestine ou d’un trafic « ordinaire » de fausse monnaie, comme les polices en démantèlent tous les jours, partout dans le monde. Il ne s’agit pas non plus d’une décision souveraine et responsable de la BCT de faire tourner la planche à billets, comme cela arrive dans certains pays, y compris d’Europe, pour relancer l’économie par stimulation monétaire. C’est plus complexe, plus subtil et plus grave : en réalité, les billets imprimés ne sont pas des coupures contrefaites, et la BCT n’a pas officiellement autorisée la fabrication de telles quantités de billets, mais elle n’a rien fait pour empêcher cette pratique, qui était tolérable et « légale » au départ –soi-disant pour retirer de la circulation les vieux billets- mais qui a pris ces derniers temps des propensions mafieuses, au risque d’un effondrement total et irréversible de l’économie tunisienne. Pour être plus clair, il y a eu emballement de la machine à monnaie, puisque la quantité de nouveaux billets émis est de loin supérieure à celle des « vieux » billets retirés de la circulation !
Les raisons et les risques de la planche à billets
Généralement, c’est en cas de crise ou de récession économique que les Etats recourent à la planche à billets, ou « quantitative easing ». C’est que la planche à billets est le plus facile remède à la déflation. A condition qu’elle soit raisonnable et que le volume d’argent corresponde toujours à la réserve en or, cette politique anti-déflationniste par stimulation monétaire, permet théoriquement à l’économie de repartir, par incitation aux emprunts et à la consommation. Ces trois dernières années, les Etats-Unis, le Japon et même la Banque centrale européenne (BCE) ont pratiqué cette politique non-conventionnelle qui consiste à accroitre la masse monétaire. C’est notamment par ce moyen très commode que l’Europe a pu secourir l’économie grecque et soutenir l’économie espagnole.
Cependant, même pour des puissances économiques comme les Etats-Unis, ou le Japon, ou l’Europe, le recours à la planche à billets est un remède qui peut parfois se révéler plus nuisible que le mal, à savoir la déflation, qui est un cycle destructeur d’emplois. Cette politique peut déboucher sur une bulle monétaire difficilement contrôlable. A plus forte raison pour un petit pays comme la Tunisie. L’injection à outrance d’argent entraine ipso facto une dévaluation de la monnaie locale. Le plus grand risque est évidemment l’inflation paroxystique, c'est-à-dire le stade où la monnaie locale n’a plus aucune valeur réelle. Ce fut le cas de l’Argentine en 1991 et surtout de l’Irak sous blocus, lorsque les commerçants n’utilisaient plus les calculatrices mais les balances à peser. Pour 1Kg de patte, 3Kg de billets, et pour 1Kg de sucre, 5 Kg de billets ! En termes plus clairs, ce que la troïka fait depuis des mois, avec un Chedly Ayari pris en otage, peut provoquer un double effondrement : un effondrement monétaire et un effondrement économique.
Un secret bien gardé
Selon le gouverneur de la BCT -qui devait démentir la fameuse « rumeur »-, de nouveaux billets ont été effectivement mis en circulation pour « remplacer les billets rendus inutilisables à l’usage et qui doivent être retirés de la circulation ». C’est totalement faux, ou plus exactement, c’est l’arbre qui cache la forêt. On a injecté de l’argent principalement pour combler le très important déficit budgétaire, et pour donner l’illusion que l’économie tourne et que l’argent coule à flot. C’est en effet le cas, sauf que cet argent est une monnaie de singe ! C’est-à-dire qu’elle n’a pas de valeur réelle, qui correspond à une richesse produite ou induite. Lorsque la banque centrale japonaise ou européenne actionne la planche à billets, elle le fait de manière rationnelle, ponctuelle et, surtout, proportionnelle aux richesses du pays, à son potentiel économique, à ses réserves en or. En Tunisie, on a imprimé de l’argent pour colmater les brèches, pour retarder un crash inexorable, sans tenir compte des normes nationales et internationales. Mais, comme on le constatera plus loin dans cet article, une partie de cette vraie fausse monnaie servirait au financement d'activités extra-lègales et mafieuses.
D’ailleurs, dans son interminable communiqué intitulé « Précisions de la BCT sur la Politique Monétaire » http://www.bct.gov.tn/bct/siteprod/documents/precisions_fr.pdf, la Banque Centrale n’évoque pas du tout l’histoire du remplacement des vieux billets, mais invoque une raison plus crédible : le manque de liquidités bancaires. Nous y voilà ! Plus bizarre et plus symptomatique encore, l’auteur du communiqué de la BCT affirme « catégoriquement que les statuts de la Banque ne permettent pas l'utilisation de la planche à billets » ! Effectivement, cela n’est pas autorisé, selon l’article 47 bis de la loi fixant les statuts de la BCT.
Une économie dévastée
Les initiés, notamment la présidente de l’UTICA, le secrétaire général de l’UGTT, les banquiers et le milieu des affaires le savaient déjà depuis des mois : avec un endettement de 51% du PIB (et non pas 48%, comme ils disent), alors qu’il était de 37% en 2010, avec une inflation de 12% (et non pas 5,6%, comme ils disent), avec toutes les entreprises étrangères et même tunisiennes qui ont délocalisé ailleurs, principalement au Maroc, l’économie tunisienne a franchie la ligne rouge, c’est-à-dire qu’elle est sur la pente de la récession. Par rapport au surendettement actuel, et compte tenu de la population tunisienne, il faut savoir que chaque nouveau né tunisien arrive au monde avec une dette de 20 000 dinars! Qui plus est, les emprunts contractés depuis janvier 2011 ne servent pas à l'investissement mais à la consommation.
La note souveraine de la Tunisie a été revue à la baisse à deux reprises, depuis le 14 janvier 2011 (de BBB avec perspective stable, à BBB- puis à BBB- avec perspectives négatives). En outre, après avoir abaissé la note de la dette de la Tunisie, l’agence de notation Standard&Poors a publié un rapport en janvier 2012, qui indique que le déficit budgétaire de la Tunisie atteindrait les 9% du Produit Intérieur Brut (PIB) en 2012. Standard&Poors prévoyait par ailleurs une augmentation du taux d’endettement de la Tunisie pour atteindre les 50% en 2013. Nous y sommes et même plus, puisque ce taux est arrivé à 51%. En juillet 2012, l'Agence de notation Moody's a fait part de ses inquiètudes quant à la stabilité macro-économiques de la Tunisie. Une manière policée pour dire que l'économie du pays s'est effondrée et que son maintien est purement artificiel.
Interviewé par le magazine d’expression arabe Al- Maghreb, en date du 9 septembre 2013, Samir Bettaïeb, membre de l’Assemblée Constituante, a déclaré que madame Wided Bouchamaoui (UTICA) lui a exposé la situation économique du pays qui l’a laissé perplexe. Selon Bettaïeb, « Dans les deux mois qui viennent, l’Etat sera incapable de verser les salaires des fonctionnaires ». En réalité, selon nos sources, c’est depuis janvier dernier (2013) que l’Etat n’est plus en mesure de payer les salaires des fonctionnaires et de financer les grands projets. S’il a pu le faire jusqu’à présent, c’est précisément grâce à la planche à billets. En d’autres termes, ce n’est ni pour éviter la déflation, ni pour réactiver l’économie, mais pour maintenir en survie artificielle un Etat en faillite.
Démagogie et omission de Chedly Ayari
En janvier dernier, précisément, le gouverneur de la Banque centrale affirmait que « la liquidité du trésor public permet d’assurer la paie de plusieurs mois ». En Août dernier, il réitérait ce mensonge lors d’un entretien pour African-manager en précisant qu'il est « ridicule de dire que l’Etat tunisien est incapable de payer les salaires », assurant qu’il « n’y a aucune crainte à ce sujet », et que « sauf catastrophe, il n’y a pas de raison de penser que les recettes programmées par l’Etat pour 2013 ne rentreront pas ,d’ici la fin de l’année dans les caisses de l’Etat ». Si Chedly Ayari gère la BCT comme il a géré la BAD (Banque africaine de développement), on peut être sûr du résultat !
Le quotidien Attounissya, dans son édition du 6 septembre dernier, a indiqué que «le SG a exprimé des craintes quand à la décision de la BCT d’imprimer de nouveaux billets et de les mettre en circulation». Attounissya a cité un professeur d’économie qui a expliqué que «ce procédé est normal et que cela est une sorte de prêt que fait la BCT au gouvernement pour l’aider à faire face à des dépenses comme celles des salaires».
Professionnels et sérieux, nos confrères d’African-Manager ont voulu en savoir davantage en interrogeant le gouverneur de la BCT. Chedli Ayari a répondu que «les textes interdisent à la BCT de prêter de l’argent à l’Etat » et la banque ne l’a pas fait. Il a précisé ensuite que « la BCT n’imprime de nouveaux billet que pour remplacer les billets rendus inutilisables à l’usage et qui doivent être retirés de la circulation ».
Selon les dires de Chedly Ayari, la masse monétaire nouvellement imprimée a concerné 23 millions 200 mille coupures de 50 DT, le retrait de 47 millions 677 milles coupures de 30 DT et 172 millions 840 mille coupures de 20 DT. A la BCT, écrit African Manager, « on nous assure aussi, que toute impression de nouveaux billets se fait sur décision du conseil d’administration, que cette décision remonte à 2011… que la BCT n’actionne pas la planche à billets lorsqu’elle le veut ou lorsque le gouvernement le lui demanderait. C’est certes en fonction du stock de billets et de son état, mais c’est toujours sur une décision actée au sein de son Conseil d’Administration et donc jamais sous cape ». Contraint de se justifier, le gouverneur de la BCT a assuré que cette injection n’a et n’aura aucun effet sur la masse monétaire actuellement en circulation dans le pays, précisant que «cette masse était, à la date du 3 septembre 2013, de 7630 MDT et elle est suivie comme le lait sur le feu et reste stable depuis des mois».
A moins qu’en une semaine la planche à billets ait été encore actionnée, le montant de la masse monétaire nouvellement imprimée n’est pas de 23 millions 200 mille coupures de 50 DT, mais quasiment le double, c’est-à-dire 44 millions 300 mille coupures de 50 DT. A la date d’aujourd’hui, la masse monétaire en circulation est de 11 820 MDT, et non pas 7630 MDT. Une simple soustraction permet de constater qu’il y a 4191 MDT non déclarés, qui auraient été versés sur des comptes appartenant à des membres d’Ennahda, dans les banques suivantes : BH (Banque de l'Habitat), Banque Zitouna, Tunisian Qatari Bank, Al-Baraka et la Banque tuniso-libyenne. Selon nos informations, cet argent servirait à financer certains réseaux parallèles de l’Etat et certaines filières terroristes, ainsi qu'à engraisser certains agents sécuritaires de la Présidence et de l'Intérieur, notamment la "police parallèle", dont Walid Zarrouk a révélé l'existence et les turpitudes: connexions avec des groupuscules terroristes, liens avec des narco-trafiquants...Même si nous ne sommes pas en mesure d'affirmer ces informations, on lance un appel à nos confrères tunisiens pour complèter notre investigation, en demandant tout simplement aux banques citées les noms des personnes ou des sociétés qui ont ouvert ces comptes dans les différentes banques citées.
Des criminels à la tête d’un Etat voyou
On le constate à tous les niveaux et dans tous les ministères, les islamistes et leurs alliés de la troïka ne se comportent pas comme des responsables soucieux de l’avenir immédiat du pays, mais comme des voyous qui considèrent l’Etat comme leur bien propre. En somme, la planche à billets serait un butin de guerre. Ou bien on emprunte à l’étranger, ou bien on imprime nous même l’argent, ce qui revient d’ailleurs à une forme d’emprunt, puisqu’en injectant de nouveaux billets, la BCT est sensée prêter de l’argent à l’Etat ! C’est à cela que se résume la « stratégie » économique des voyous qui sont au pouvoir.
Pourquoi la BCT s’est-elle aussi gravement compromise ? Pour répondre à cette question, il faudrait poser une autre : pourquoi Mustapha Kamel Nabli a-t-il été démis de ses fonctions en juillet 2012, et selon quels critères l’a-t-on remplacé par Chedly Ayari ? C’est le larbin de Rached Ghannouchi, à savoir Moncef Marzouki, qui a répondu à l’époque dans ces termes, lors d’une allocution télévisée : « Cette décision reflète un attachement à ce que l’Assemblée constituante exerce ses responsabilités en engageant des réformes profondes du secteurs monétaire et financier ». L’ensemble des analystes avaient relevé le côté ridicule de l’argument Tartourien, puisque les compétences de Mustapha Kamel Nabli ne sont pas comparables à celles auxquels le président provisoire prétendait confier un secteur aussi important, à savoir les « élus du peuple », comme Meherzia Labidi, Samir Ben Amor, Abderraouf Ayadi, Sahbi Atig, Mohamed Abbou, Walid Bennani, Habib Ellouze, Sadok Chourou…Quant à l'argument suivant lequel Mustapha Kamel Nabli est un homme de l'ancien régime, on rappelle que son successeur a toujours été proche du pouvoir, jusqu'à sa nomination par Ben Ali comme Sénateur (2010).
Ce n’est pas un « élu du peuple » qui a remplacé l’ancien gouverneur de la BCT, mais l’élu de Rached Ghannouchi, fortement appuyé par Mustapha Ben Jaafar, ami et voisin (à Gammarth) de Chedly Ayari. En fermant les yeux sur la planche à billets, ce dernier se rend complice d’un crime contre les intérêts supérieurs de l’Etat et contribue au maintien en poste de ce gouvernement corrompu et incapable, qui a détruit en moins de deux ans les acquis de 25 ans. Il n’y a aucune politique ou stratégie économique en Tunisie, mais juste des subterfuges monétaires palliatifs, couvrant volontairement ou involontairement des pratiques criminelles et mafieuses, qui mènent le pays à la faillite économique totale et au chaos social. Le devoir de Chedly Ayari est de sortir de son mutisme, de parler vrai, sans tenir compte des pressions de la mafia qui est au pouvoir, avec à sa tête Rached Ghannouchi, ni des réprimandes du Tartour qui l'a reçu aujourd'hui et qui n'en a plus pour longtemps! TunisieSecret
Karim Zmerli, avec l’éclairage du professeur J.Z