Economie : un investissement de plus de vingt ans parti en fumée, par Taoufik Baccar


8 Janvier 2016

Depuis cinq ans, la situation économique et financière tunisienne ne cesse de se dégrader, ce qui ne semble pas inquiéter les autorités concernées, encore moins les « représentants du peuple ». Dernière alerte qui annonce ou plutôt confirme la faillite du pays : « l'Agence Japonaise de raiting R And I dégrade la notation de la Tunisie: un investissement de plus de vingt ans parti en fumée ». En mai dernier, réagissant à un communiqué du FMI qui a pris la forme d'un véritable ultimatum aux autorités tunisiennes, Taoufik Baccar avait déclaré « qu’entre 1991 et 2010, le FMI n'a pas prêté un seul dollar à la Tunisie » !


Taoufik Baccar, Ancien ministre et ex Gouverneur de la Banque centrale.
L'Agence Japonaise R and I vient de dégrader la notation souveraine de la Tunisie de BBB- a BB + avec une perspective négative. Ce n'est pas la première fois que la Tunisie se trouve dégradée, loin s'en faut mais cette dernière dégradation fait particulièrement mal et à plus d'une portée.

C'est d'abord la dernière Agence de raiting qui a maintenu le grade d'investissement et avec cette dernière dégradation la Tunisie a perdu cette qualité auprès de toutes les agences.

C'est ensuite une dégradation décidée par une Agence qui a beaucoup cru à notre pays, qui a accompagné sa première entrée sur le marché financier international en 1994 et en particulier sur le marché Samouraï et qui a fait accéder la Tunisie au club des pays classés À en 2007 en lui attribuant la notation A. Depuis cette date, la Tunisie aurait perdu quatre crans. C'est donc une parenthèse de plus de vingt ans qui se ferme aujourd'hui et un investissement important consenti par des personnes patriotes et compétentes qui est parti en fumée en l'espace de cinq ans.

Pour ceux qui considèrent que l'accès au marché financier international et par conséquent le recours à une agence de raiting comme une atteinte à la souveraineté d'un pays, je leur dis que c'est absolument faux. Bien au contraire, l'accès à ce marché fournit une alternative de financement et met les pays à l'abri de la pression et des conditions imposées par les organisations financières internationales multilatérales. Malheureusement, cette alternative n'existe quasiment plus pour la Tunisie qui n'a plus de choix que de se soumettre aux fameuses matrices de condition alités ou d'accepter des charges financières exorbitantes qui hypothèqueraient l'avenir des générations futures.

Beaucoup de mes amis me posent la question : que faire ? A ceux là, ma réponse est claire : il faut d'abord une vision et un programme, le reste relève de solutions techniques que les spécialistes sauront trouver.

Taoufik Baccar, ancien ministre et ancien Gouverneur de la Banque centrale.